Evian, Palais Lumière, 2 juillet – 1er novembre 2022

Quimper, musée des Beaux-Arts, 15 décembre 2022- 13 mars 2023

Commissariat scientifique : Leïla Jarbouai, conservatrice en chef au musée d’Orsay

avec la collaboration de Géraldine Masson, collaboratrice scientifique arts graphiques, musée d’Orsay Commissariat général à Evian, William Saadé, conservateur en chef honoraire du patrimoine Commissariat général à Quimper, Guillaume Ambroise, conservateur en chef, directeur du musée ; Florence Rionnet, conservatrice, directrice-adjointe du musée.

Le musée d’Orsay est riche d’une collection d’environ 55 000 dessins dont plusieurs centaines de carnets et de pastels, dessinés par plus de 6 000 artistes différents.

En raison de la fragilité des œuvres sur papier à la lumière, la majeure partie de ces feuilles est conservée en réserve et accessible au public pour consultation aux cabinets des arts graphiques du musée du Louvre et du musée d’Orsay. Cette collection est à la fois vertigineuse et aléatoire : vertige du nombre, hasard des dons, legs, ventes, des opportunités, des personnalités, des rencontres, de la répartition entre collections nationales, qui permet d’esquisser une histoire de l’art de la période 1848-1914 comparable à un puzzle immense dont il manque toujours des pièces.

Les dessins, provenant souvent de l’univers intime des artistes, sont moins connus et moins documentés que les chefs-d’œuvre exposés. Une exposition hors les murs d’une partie de la collection d’arts graphiques est donc l’occasion de la valoriser et de l’étudier, et de proposer un riche aperçu de la pratique du dessin durant la seconde moitié du XIXe siècle, à travers les aspects variés de ce medium, tant dans les techniques (pastel, fusain, aquarelle, encre, graphite…) que dans les usages (carnets de croquis, projets d’illustrations, belles feuilles de présentation…).

Le fil qui relie les arpenteurs choisis dans l’exposition est le rêve, non pas suivant son sens limité d’activité nocturne durant le sommeil, mais entendu au sens large de vie intérieure, de relation entre subjectivité et réalité, de dépassement du visible, d’onirisme, rêverie et imagination créatrice. L’exposition est une invitation au voyage, moins au voyage pittoresque qu’au voyage-vagabondage dans l’imaginaire poétique des artistes qui pénètrent la « seconde vie » qu’est le rêve et percent « ces portes d’ivoire ou de corne qui nous séparent du monde invisible. » (Gérard de Nerval, Aurélia). Grâce au pouvoir de l’imagination, ils créent « un monde nouveau » apparenté avec l’infini (Charles Baudelaire, Salon de 1859, « La reine des facultés »).

Le parcours s’articulera à partir de cinq sections : regards intérieurs ou figures du rêve et de la rêverie ; expériences oniriques du paysage ; par monstres et merveilles ; au fil des pages et dessins inspirés par la musique.

Le musée d’Orsay est riche d’une collection d’environ 55 000 dessins dont plusieurs centaines de carnets et de pastels, dessinés par plus de 6 000 artistes différents. En raison de la fragilité des œuvres sur papier à la lumière, la majeure partie de ces feuilles est conservée en réserve et accessible au public pour consultation aux cabinets des arts graphiques du musée du Louvre et du musée d’Orsay. Cette collection est à la fois vertigineuse et aléatoire : vertige du nombre, hasard des dons, legs, ventes, des opportunités, des personnalités, des rencontres, de la répartition entre collections nationales, qui permet d’esquisser une histoire de l’art de la période 1848-1914 comparable à un puzzle immense dont il manque toujours des pièces. Les dessins, provenant souvent de l’univers intime des artistes, sont moins connus et moins documentés que les chefs-d’œuvre exposés. Une exposition d’une partie de la collection d’arts graphiques est donc l’occasion de la faire connaître, et de proposer un riche aperçu de la pratique du dessin durant la seconde moitié du XIXe siècle, à travers les aspects variés de ce medium, tant dans les techniques (pastel, fusain, aquarelle, encre, graphite…) que dans les usages (carnets de croquis, projets d’illustrations, belles feuilles de présentation…).

Le fil conducteur choisi pour s’orienter dans la collection est celui du cheminement par et à travers l’imaginaire des artistes, sans les enfermer dans des mouvements et en tissant un dialogue plutôt par association libre, guidée par des affinités et des contrastes plastiques et thématiques entre leurs dessins. Le dessin permet une liberté dans la confrontation et le dialogue des œuvres, sans doute plus grande que dans la peinture, car les artistes s’y expriment de manière plus spontanée et des points de jonction se font de manière inattendue entre des réalistes, des impressionnistes, des symbolistes (largement représentés dans l’exposition) dans leur travail « de base », leur première approche intellectuelle et sensible du réel par le dessin. Ce mode de rapprochement entre les œuvres révèle la déconnexion entre la réalité des œuvres d’art et l’idéalité des récits de l’histoire de l’art.

Le dessin est souvent plus un processus qu’un résultat, une dynamique qu’une œuvre. Le mouvement est au cœur du dessin. Les dessinateurs arpentent la feuille avec leurs matériaux d’une manière très directe, comme avec le prolongement de la main ; « arpenteur » évoque ce travail de la main qui trace des lignes et se regarde tracer ces lignes. Le tracé, le trajet, les retours, les repentirs et les reprises sont partie intégrante du dessin. Le chemin n’y est pas toujours déterminé : le dessin est le lieu d’expérimentation, d’hésitations, où le doute reste visible. On y voit le cheminement de l’artiste, qui pourra aboutir à autre chose, à un tableau, un décor, une sculpture, un objet, une architecture, mais le plus souvent cheminement sans but, ou sans but autre que de dessiner mieux, mieux saisir la forme, mieux donner corps à ses rêves, parfois pur plaisir et délassement. « Arpenteur » traduit ainsi la dimension inchoative et progressive du dessin.

Le dessin est non seulement l’image ou la bribe d’image réalisée mais aussi et surtout la manière de dessiner, le dessin « n’est pas la forme mais la manière de voir la forme » (Degas). Le geste et l’élan de l’artiste demeurent inscrits sur la feuille. Dans le dessin, on voit le surgissement de la forme, le projet, l’idée, la recherche. L’artiste traverse l’espace limité de la feuille : il l’arpente, il apprivoise ou combat le vide, il le rend visible par une ligne. Arpenter, terme de géomètres et architectes, traduit un rapport à un espace, l’espace de la feuille démultiplié dans les carnets, reprises, variations, et par rapport à des thèmes, inlassablement repris par les artistes (Boudin et les études de ciel, Fantin-Latour et les projets de compositions à plusieurs figures, Redon et les arbres, etc.).

Le fil qui relie les arpenteurs choisis dans l’exposition est le rêve, non pas suivant son sens limité d’activité nocturne durant le sommeil, mais entendu au sens large de vie intérieure, de relation entre subjectivité et réalité, de dépassement du visible, d’onirisme, rêverie et imagination créatrice. L’exposition est une invitation au voyage, moins au voyage pittoresque qu’au voyage-vagabondage dans l’imaginaire poétique des artistes qui pénètrent la « seconde vie » qu’est le rêve et percent « ces portes d’ivoire ou de corne qui nous séparent du monde invisible. » (Gérard de Nerval, Aurélia). Grâce au pouvoir de l’imagination, ils créent « un monde nouveau » apparenté avec l’infini (Charles Baudelaire, Salon de 1859, « La reine des facultés »).

Le parcours s’articulera à partir de cinq sections : regards intérieurs ou figures du rêve et de la rêverie ; expériences oniriques du paysage ; par monstres et merveilles ; au fil des pages, et dessins inspirés par la musique.

 

DERRIÈRE LES PAUPIÈRES 

Le modèle rêveur ou endormi, qui s’absente, est l’occasion pour le dessinateur d’explorer un regard autre : la vue échappe, l’œil clos ou dans l’ombre sont signes de vision, voire de voyance. « Ferme l’œil de ton corps afin de voir avant toute chose ta propre image par l’œil de l’esprit » (Caspar David Friedrich). Le leitmotiv du sommeil et des « belles endormies » permet de tenter de donner à voir « l’œil de l’esprit », de voyager « à l’intérieur de la vue » (Max Ernst). Ces figures sont dans un temps suspendu que l’artiste cherche à capter. Allégorie ailée du sommeil, figures endormies aériennes ou lourdement terrestres, femmes plongées dans la lecture, visages ambigus entre statues et êtres animés, entre portraits et pures épures de profil, entre personnes et apparitions, toutes ces images partagent leur mystère. Les techniques graphiques employées, crayon noir, sanguine, fusain en particulier, sont les adjuvantes parfaites pour l’exprimer.

 

EXPÉRIENCES ONIRIQUES DU PAYSAGE 

Cette section sur le paysage s’inspire en partie de la philosophie bachelardienne des éléments, feu, eau, air et terre. « On rêve avant de contempler. Avant d’être un spectacle conscient tout paysage est une expérience onirique. » « On ne rêve pas profondément avec des objets. Pour rêver profondément, il faut rêver avec des matières. » écrit Gaston Bachelard dans L’eau et les rêves.

Sont réunis ici des paysages dynamiques, arbres et forêts, gouffres et abîmes, cimes, nuages et rivages, traversés par le mouvement de lignes de routes, l’élancement des arbres, la chute ou l’ascension, la fugacité des nuages…

Des paysages « états de matière » (en référence à l’expression paysages « états d’yeux » de Degas) sont rassemblés : fusains brumeux ou rugueux (Pointelin, Gonzales), pastels iridescents pour des ciels marins (Boudin) et des nocturnes urbains (Nocturnes de Rippl- Ronai).

 

PAR MONSTRES ET MERVEILLES 

Créatures imaginaires, êtres hybrides, composites, angoissants ou ludiques, défis à la règle de la raison, naissent au fil des méandres de la ligne ou des rêveries de l’artiste. Un espace est dévolu aux chimères, centaures, œil-fleur, têtes-serpents, anges-démons d’Odilon Redon inspirés par les « confins du monde imperceptible » (comme il l’écrit dans ses confidences d’artistes, A soi-même).

Sont présentés squelettes et visions macabres de Julien-Adolphe Duvocelle, James Ensor, Paul Gauguin, femmes fatales d’Emile Bourdelle et Gustave Moreau, inspirées par les mythes, légendes et contes (Artémis, Bethsabée, La Péri), anges de l’enfance (Gustave Doré) ou de la mort (Carlos Schwabe), jardins merveilleux ou mystiques (Charles Dulac), paysages mystérieux (Gustave Moreau) ou monstrueux (Léopold Chauveau).

 

AU FIL DES PAGES

Les dernières décennies du XIXe siècle sont un véritable âge d’or pour les liens entre les arts et pour l’édition. Dans les années 1880, Félicien Rops travaille essentiellement pour la littérature, illustrant Jules Barbey d’Aurevilly (Les Diaboliques), Stéphane Mallarmé (La Grande Lyre), Joséphin Péladan (L’initiation sentimentale). Son élève Armand Rassenfosse puise son inspiration dans Baudelaire et Villiers de l’Isle-Adam. Luc-Olivier Merson illustre Victor Hugo et José Maria de Heredia dans des éditions de luxe publiées mais a aussi le projet, inachevé, de travailler sur Macbeth de Shakespeare. Le musée d’Orsay a dans sa collection des séries entières de dessins réalisés à partir de textes (gouaches de Carlos Schwabe pour Le Rêve de Zola ; aquarelles et encres de Marie-Louise Amiet pour La Légende de Saint Julien L’Hospitalier de Flaubert, texte lui-même inspiré par des vitraux de la cathédrale de Rouen…). Une sélection de dessins de diverses séries de Maurice Denis dont ceux pour Le Voyage d’Urien d’André Gide (1892), seront exposés. Moins que des illustrations, ces images sont d’après Gide, un « voyage fait ensemble » par le dessinateur et l’écrivain. Ce livre est l’histoire d’un voyage intérieur : « Ce voyage n’est que mon rêve,

/ nous ne sommes jamais sortis / de la chambre de nos pensées » (André Gide). Maurice Denis accompagne ce voyage imaginaire avec les sinuosités, le rythme et la mélodie des lignes.

 

DE LA MUSIQUE AVANT TOUTE CHOSE 

Cette mélodie des lignes assure la transition avec la dernière section de l’exposition, autour de la musique, tant sujet que modèle pour un art qui préfère la suggestion à la représentation. Amateur de Wagner, de Clara et Robert Schumann, de Brahms et Berlioz, Fantin-Latour cherche moins à illustrer des thèmes musicaux qu’à exprimer l’indicible. Manet croque son orchestre comme des notations musicales. Ernest Laurent, proche ami de Seurat, s’intéresse à l’écoute et tente de capter l’attention rêveuse des spectateurs – auditeurs du Concert Colonne en vue d’un tableau inspiré par Beethoven (Scène au bord du ruisseau, Beethoven op. 68). Le compositeur apparaît également à travers le dessin de son masque, très présent dans les ateliers d’artistes à la fin du siècle (Mariano Fortuny).

 

L’exposition se clôt par des dessins – projets, explosions de couleurs, qui s’inspirent de l’art musical, non seulement par leurs thèmes mais aussi et surtout par l’importance accordée à la musicalité interne du dessin (composition, mélodie, rythme des lignes et des couleurs) et à l’effet de cette musicalité sur le spectateur.

By Art-Trends

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